7 Juin 2015
– Maïa, je te rappelle, je pars en réunion.
– Ah, mais attends, je voulais…
– Pas le temps.
Je raccroche et me tourne vers M. Pressé.
– Qu’est-ce qu’il y a de drôle ?
– De drôle ? Absolument rien. Navrant, à la rigueur, mais drôle, non, désolé, je ne vois pas.
Apparemment, le sarcasme reste son mode d’expression préféré quand il s’adresse à moi.
– Et ça fait combien de temps que vous êtes là, à soutenir cette porte ?
Il se redresse, visiblement contrarié que je lui fasse remarquer qu’il ne fout rien.
– Je viens d’arriver, je m’ennuyais dans mon bureau à attendre ce contrat.
– Il est prêt, dis-je avec un sourire triomphant.
Il m’arrache les feuilles des mains et retourne à son bureau.
– Bravo, lance-t-il sans se retourner, vous aurez au moins réussi une chose aujourd’hui… Parlez-en à votre psy, il sera fier de vous.
– Tiens, Cendrillon, t’as oublié ta pantoufle. Pour ta gouverne, sache que j’aime qu’une femme soit consentante et consciente quand je lui fais l’amour. Tu as peut-être été mal habituée avec tes petits copains de beuverie, mais avec moi, c’est comme ça. Je ne voyais donc aucun intérêt à te toucher hier soir. Cela dit, quand je te vois habillée comme ça, je me dis que les vêtements féminins sont vraiment mal pensés parce qu’il n’y a rien de plus sexy qu’une femme dans votre chemise, surtout si elle est froissée. Alors oui, si tu veux confirmation, malgré ton caractère de merde et ton épuisant sens logique, tu me fais bander, et non, ce n’est pas un simple réflexe. Mais bon, je suis un connard, toi, une salope, on va donc chacun gentiment retrouver notre chambre.
Là-dessus, il pose ses lèvres sur les miennes et me claque la porte au nez
En attendant, je me traîne dans la chambre et je m’écroule au milieu du lit. La chambre tourne, tourne, tourne de plus en plus vite. C’est horrible mais, heureusement, je sombre aussitôt dans un sommeil sans rêve. Qui dure environ deux minutes.
– Mais qu’est-ce que c’est que ce bordel ? Qu’est-ce que tu fous là ?
Un dragon est entré dans la pièce et parle directement à l’intérieur de ma tête, c’est forcément ça. Oh putain, ma tête… J’ouvre un œil sans plus trop savoir qui je suis ni encore moins où je suis et, dans un mince filet de lumière qui me vrille le cerveau, je vois Julien, éberlué, au pied du lit.
J’articule une suite de syllabes qui doit à peu près ressembler à « Qu’est-ce que… fous… ma chambre ?
– Ta chambre ? Ma chambre, oui !
– Hein ?
Je me redresse un peu trop vite. Aïe, ça tourne.
– Quelle heure il est ?
– 2 heures, mais je ne vois pas ce que ça change !
– J’ai pas de chambre ! Enfin, je l’ai perdue.
– Alors tu t’es dit que la mienne serait parfaite ? Je me doutais que tu avais des vues sur moi, mais on a connu des techniques de drague plus subtiles, dit-il avec un sourire qui me semble de plus en plus bizarre.
– Je te répondrais si j’avais pas autant envie de vomir. Mais bon, si tu veux me virer, OK, je préfère dormir dehors avec des chacals !
Je me lève (pour me souvenir trop tard que je suis en string) et retombe sur le lit, non pas gracieusement comme dans un bon film romantique, mais juste comme une merde pleine de rosé.